Article 30 : The handmaid's tale

Série : The handmaid's tale


Scénariste : Inspiré de Margaret Atwood
Créateur : Bruce Miller
Genre : Science-fiction

Je commence cet article au milieu de l’épisode 5. Et l’avancerai probablement jusqu’à la fin de la première saison.
        Je dois avouer que je suis circonspect. Et il va s’agir de ma première sincère critique, là où d’habitude j’analyse des œuvres que j’adore (en expliquant pourquoi elles sont bien). 
           Il s’agit d’une série que je voulais voir depuis longtemps, société totalitaire où les femmes sont opprimées et méprisées, œuvre de science-fiction, d’anticipation. Bref, un potentiel certain. Mais je vais commencer par ce qui, selon moi, pose souci. Le fait est que la science-fiction est un genre extrêmement difficile à appréhender puisque, bien que cela n’en fasse pas sa matière principale, la logique qui amène au récit est la principale fondation qui fait que l’œuvre ait un intérêt.
         Cette fondation peut être esquivée. En effet, bon nombre d’œuvres de ce genre ne se fatiguent pas. On peut soit imaginer un énorme évènement sans le décrire qui mène au récit, soit se placer franchement dans une réalité quasi-alternative. Par exemple, Hunger Games, qui pourtant se destine à un public moins maturé si j’ose dire, passe très rapidement sur ce qu’il y avait avant la situation dans laquelle se déroule le récit. Ainsi, on n’a pas à être gêné par des questions de logique à ce qui a amené cela. 12 districts, un Capitole, ça n’a peu de sens, mais puisque c’est situé très loin de la réalité, on peut apprécier le récit sans crainte.
       Si on prend maintenant un autre exemple, celui de Westworld (je prends volontairement des exemples très connus pour ne pas perdre tout le monde), on a très peu d’aperçus du monde extérieur, de la réalité. Pourtant, on se dit que ce parc doit prendre de la place, doit être quasiment impossible à réaliser, mais cette pensée est vite balayée puisque ce n’est clairement pas le but du récit.

       Là où the Handmaid’s Tale pêche, c’est par ces flashbacks, directement dans NOTRE réalité, celle où la place de la femme, bien que non idéale il est vrai, reste normale. On peut estimer qu’il se passe quelques années entre l’état normal du pays, et le soudain changement (on apprend que c’est trois ans si ma mémoire est bonne). Comment, en si peu de temps, un pays aussi iconique que les États-Unis peut sombrer dans de telles extrémités ? Certes, il est vrai que les US ont une tradition religieuse bien plus prononcée qu’en Europe, mais en arriver à là ? En trois ans ?
         Le contexte est clair, la plupart des femmes sont désormais stériles à cause de la pollution et des MST qui se sont multipliées. La solution est de sélectionner les femmes restantes qui sont fertiles, et de les asservir pour qu’elles aident à faire en sorte que la population se renouvelle.

        Bon. Dans un premier temps, il est difficile d’imaginer une telle chose arriver en Europe puisque la tradition religieuse y est aujourd’hui bien moins marquée qu’aux États-Unis. La religion est quelque chose qui faiblit chez nous, et qui rend cette dystopie encore plus difficile à prendre au sérieux. Un groupuscule, une secte même prend le pouvoir par un coup d’état. Bien, on ne voit pas vraiment dans cette première saison comment ils ont eu les moyens de renverser tout un gouvernement, malgré les problèmes posés. On ne voit pas comment ils ont réussir à détruire les droits de la femme aussi facilement. Les US ont beau avoir élu Trump, son programme est ridicule comparé à ce qui se passe.
    Et puis même, rien ne fait sens. Sincèrement, tout ce processus pour enfanter, cette scène insoutenable où la servante se fait violer par le commandant de la maison sur les genoux de l’épouse. Pourquoi ? Je veux dire, dans une époque où la fécondation sans passer par l’acte charnel est clairement possible, à l’évidence bien plus supportable pour la femme, même avant de passer par toutes les considérations résultant de l’inégalité évidente de cette société, pourquoi ?
      Pour les détruire psychologiquement ? Pour pousser à la révolution et faire en sorte d’avoir un scénario ? C’est pareil, la scène où l’épouse jette violemment la servante dans sa chambre parce qu’il s’avère qu’elle n’est pas enceinte, je veux dire… D’accord la déception est grande, d’accord la frustration est présente, mais sérieusement ? Je trouve que cette scène si elle se justifie apporte surtout au scénario un manichéisme trop voyant, et donc dommageable.
               
     Mais toute cette mise en place est extrêmement étrange, les tantes qui servent d’enseignantes extrêmes pour les servantes, les militaires présents absolument partout en ville au point qu’on se demande comment ce régime peut être durable et envisageable. Tout une partie de la population qui ne travaille plus (les femmes) et probablement la moitié des hommes qui deviennent militaires ?
      Je pourrais passer énormément de temps à commenter tout ce qui manque de sens dans le scénario de cette série (c’est un livre à la base, je tiens à préciser que je juge essentiellement ce que la série me permet de voir), mais ça ne serait pas intéressant. Le fait est qu’il ne se passe pas grand-chose au niveau de l’action (ce qu’on pourrait attendre d’une série où le scénario pêche), et que le message est pour le moins maladroit. Voit-on quoi que ce soit qui défende la femme ?
        Je ne me considère pas comme féministe, encore moins comme quelqu’un obnubilé par l’égalité, mais il est clair que le statut des femmes n’est pas comme il devrait l’être. Et si je ne suis pas pour l’égalité, je suis pour que les hommes ne soient pas favorisés par rapport aux femmes comme ils le sont aujourd’hui. Et ce même si je pense que certaines différences existent, et donc que les deux statuts ne peuvent pas être exactement les mêmes dans certains domaines de la vie (par exemple, il me paraît évident que le congé maternité doit être plus important que le congé paternité, ce qui n’est pas une égalité mais une conséquence logique de la différence des sexes).
        Ceci étant précisé, la série porte plutôt sur une dénonciation de la religion et évidemment sur le totalitarisme que sur la place des femmes. Et pourtant, on se concentre sur elles pour faire passer le message, et on ne comprend pas bien pourquoi il faut passer sur toutes cette violence totalement gratuite pour ce faire. La société manque de sens, le fonctionnement en est étrange, on ne sait pas comment les révolutionnaires ont réuni autant d’hommes armées au Etats-Unis avec autant de facilité. Critiquer l’inégalité qui règne aujourd’hui dans notre monde est aisé. Mais tout enlever aux femmes dans cette série ne peut pas avoir le but escompté, puisqu’on aurait pu mettre n’importe quelle partie de la population à leur place pour éprouver une certaine forme de pitié

        Ainsi, si le but est de nous faire réfléchir sur ce que nous faisons aujourd’hui, je pense que ce n’est pas efficace, puisque la différence est trop importante, trop brutale. Et vu que c’est ce qui m’a attiré au début pour regarder la série, je dois avouer que j’ai été plutôt déçu. L’abus de pouvoir du maître de maison est évident, il n’a même pas le droit d’avoir des relations sexuelles avec sa femme alors pourquoi se limiter vis-à-vis de la servante. Je veux dire, rien ne fait sens.
       Certes on est dans un cadre religieux, et la religion n’est pas connue pour amener des choses « logiques », mais on est quand même dans un cadre où il ne s’agit même pas d’un bond en arrière, mais d’une mise en place de quelque chose de complètement délirant. Comme je le disais au début, la science-fiction se doit de garder un minimum de cohérence. On a le droit de poser les règles de son univers, mais pas de les briser. Handmaid’s Tale prend pied sur notre univers sans rien y changer, mais la société dépeinte va à l’encontre de la logique humaine actuelle. Et l’élément justificatif qu’est le manque de fécondité n’est pas assez développer pour justifier une telle prise de partie.
           Dans l’épisode où un gouvernement étranger vient visiter le pays, potentiellement pour acheter des femmes fertiles, on se demande comment seuls les Etats-Unis ont pu en venir à cette solution. On a peut-être un début de justification, vu qu’apparemment leur solution semble intéresser les pays étrangers,  mais ça reste humainement trop extrême à mon goût… Chaque pays doivent avoir quelques femmes fertiles, il y avait de nombreuses solutions pour contrer le problème, pourquoi se noyer dans la religion, avec un rituel dérangeant au possible, et surtout une efficacité pas si appréciable qu’elle en a l’air ? On n’aura pas la réponse dans la saison 1.

Je termine sur la tentative logique de suicide de la servante borgne, qui se solde par une lapidation avortée. Il est amusant de voir que les tantes et autres autorités ont oublié qu’ils avaient des êtres humains à gérer, des êtres humains se souvenant de leur passé et de leur humanité. Comment les convaincre de tuer l’une des leur alors qu’elles vont se mettre à sa place si elles agissent ainsi ? Peut être qu’en faisant un lavage de cerveau aux enfants, il serait possible d’arriver à cette situation une fois adulte, mais en prenant des adultes conscients de leurs actes, cet évènement est ridicule, puisque manquant cruellement de logique. Tout pousse les servantes à la rébellion. Absolument tout. Et cela enlève de la crédibilité au récit.


Bref, une bonne série, mais gâchée par son manque de fondations solide à mes yeux. Cependant, après un début d’épisode 1 qui n’augurait pas du très bon [SPOILER] La punition de la fausse pendaison pour le refus de la lapidation de la servante, les premiers épisodes avec la libération de June pour un temps ont laissé entrevoir une bouffée d’air frais. On précise l’origine de la société, et on amène des éléments de féminisme bien plus assimilables et justifiés ! Enfin ! La fin de l’épisode 3 nous donne une belle approche dramatique, où on a vraiment envie qu’elle s’échappe, mais dont on sait que la fuite est impossible (il faut un scénario quand même). A suivre donc. 


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